C'est quoi, une Piscine bio ?

Ces jours-ci (fin octobre 2009), Pierre DUDIEUZÈRE attire l'attention de certains Vendarguois sur un article de quelques lignes publié dans l'Express du 18 octobre 2009 sous le titre « Piscine bio », qui signale que la commune de Marsac, dans la Creuse, a décidé de transformer sa piscine municipale en bassin écologique similaire à celui de Combloux, et donc à celui qu'il veut créer sur Vendargues (cet article est disponible sur le site de l'Express, assorti de commentaires de lecteurs maîtres-nageurs et professionnels des piscines, en cliquant ici).

Précisons tout de suite que Marsac est un village de 727 habitants situé à 369 mètres d'altitude dans le Massif Central, à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Limoges, dans le département de la Creuse, une région où les températures estivales sont certainement moins chaudes qu'à Vendargues, et que, bien qu'il soit sur l'un des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle, il ne doit pas être envahi par les touristes l'été.

Ceci étant dit, la décision prise par la municipalité de ce petit village du centre de la France ne change rien aux termes de l'avis de l'AFSSET publié fin juillet 2009 (voir notre page sur cet avis en cliquant ici), qui indiquait que « pour ce qui concerne particulièrement les baignades à traitement biologique ouvertes au public (« piscines biologiques »), l’AFSSET considère que le niveau de maîtrise des risques sanitaires proposé par les constructeurs est aujourd’hui insuffisant pour un développement libre de ces baignades en fréquentation publique » et que « l’efficacité de la filière de traitement est très incertaine car elle met en œuvre de façon artificielle un écosystème complexe dont le fonctionnement, encore mal connu, ne peut être considéré comme maîtrisé en l’état actuel des connaissances ».

Le bassin écologique qu'a promis le maire lors de la campagne des élections municipales de 2008 (voir notre page sur ce projet en cliquant ici) rentre dans la catégorie des « baignades à traitement biologique » dont parle l'AFSSET, et c'est sans doute pour cela qu'il essaye de lui redonner un peu de vraisemblance en cherchant d'autres références que celle de Combloux (en Haute-Savoie, au pied du Mont-Blanc, à plus de 1.000 mètres d'altitude, et qui, malgré cela, a été contrainte de fermer quelques jours cet été sur ordre de la DASS du fait de problèmes de pollution bactériologique). Mais parler de « piscine bio » est un abus de langage, comme le montre le fait que l'AFSSET n'utilise ce terme qu'entre guillemets et entre parenthèses pour expliciter auprès du grand public la qualification plus exacte de « baignade à traitement biologique » qu'elle utilise dans son rapport à l'aide du terme promotionnel plus porteur utilisé par les fabriquants de tels équipements.

En effet, pour pouvoir prétendre à l'appellation de « piscine », comme le rappelle l'AFSSET dans son avis *, un bassin de baignade doit contenir une eau « désinfectée et désinfectante ». Qu'est-ce que cela signifie ? Tout simplement qu'il ne suffit pas de désinfecter l'eau d'une baignade artificielle pour qu'elle ait droit au qualificatif de « piscine », mais qu'il faut que cette eau, grâce à des produits qu'elle contient (du chlore, par exemple), soit elle-même désinfectante, de manière à ce que, où qu'entre dans l'eau une personne ou tout corps étranger potentiellement porteur de germes nocifs, ces germes soient détruits avant d'avoir pu se propager jusqu'à d'autres baigneurs, par les produits que contient l'eau à cet effet.

Or, avec le type de traitement que propose le maire, l'eau est bien désinfectée (du moins le pense-t-on) par le traitement biologique lorsqu'elle passe dans la partie du bassin où sont les plantes destinées à la régénérer et à la traiter (le bassin d'épuration), mais elle n'est pas désinfectante, puisque justement elle ne contient aucun produit, chimique ou autre, ayant des propriétés désinfectantes. C'est même là l'argument principal des promoteurs de tels systèmes. Mais le résultat concret de cette option de traitement, c'est que pour que l'eau soit désinfectée, il faut qu'elle ait circulé jusqu'au bassin d'épuration naturelle par les plantes. Il n'est alors pas difficile d'imaginer ce qui va se passer : le bassin devra inclure, comme les piscines classiques, une machinerie faisant circuler l'eau en permanence (pas très « écologique », car consommateur d'énergie), qui devra être étudiée pour assurer la circulation et le recyclage de toute l'eau du bassin à un rythme suffisamment soutenu, ce qui, en fonction de la taille et surtout de la forme du bassin, risque de ne pas être simple ; mais quoi qu'il en soit, lorsqu'une personne porteuse de germes nocifs entrera dans l'eau, pour que ces germes soient éliminés, il faudra dans un premier temps qu'ils se répandent dans l'eau du bassin de baignade et qu'ils soient ensuite progressivement emportés par le courant artificiel jusqu'au lieu d'épuration, en cotoyant sur leur chemin, pendant qu'ils sont encore bien vivants, et donc en risquant de les infecter, tous les baigneurs qui sont entre la personne qui a introduit ces germes et le bassin d'épuration ! Et plus le bassin de baignade sera grand et plus les baigneurs seront nombreux, plus le risque de contamination sera important, surtout si, du fait de la forme du bassin, se créent par endroits des zones où la circulation et le renouvellement de l'eau se font moins vite que dans d'autres parties du bassin. Et comme par hasard, ces zones risquent d'être les moins profondes et les plus proches des plages, et donc celle où les jeunes enfants ont le plus de chance de se trouver, à la fois pour y apporter de la pollution, par exemple en urinant dans l'eau, et pour se faire contaminer par les germes apportés par d'autres !

« Piscine bio » est sans doute un terme porteur par les temps qui courent, mais malheureusement, ce que projette le maire à Vendargues n'a pas droit à l'appellation « piscine ». Quant à celle de « bio », là, les choses sont moins claires. Après tout, la biologie est l'étude des êtres vivants, et cela inclut l'étude des microbes et autres parasites plus ou moins nocifs pour cet autre être vivant qu'est l'homme. Un bouillon de culture de streptocoques, staphyilocoques et autres bactéries a donc parfaitement le droit à l'appellation « bio ». Mais est-ce là ce que souhaitent les Vendarguois pour aller s'y baigner ?!... Sont-ils prêts à servir de cobayes à des expérimentations sur la coexistence plus ou moins pacifique entre des bactéries diverses et variées et des représentants de tous âges de l'espèce homo sapiens sapiens dans une... une quoi, au fait ?... pas une piscine, avons-nous dit, alors quoi ?... une... « éprouvette bio » de grande taille ?!...


Voir note 3, page 3 du rapport de l'AFSSET : Selon l’article D1332-1 du Code de la santé publique, une « piscine » est un « établissement ou une partie d'établissement qui comporte un ou plusieurs bassins artificiels utilisés pour les activités de bain ou de natation » ; selon la commission P91L de l’Afnor, « une piscine est une installation comprenant principalement un (ou plusieurs) bassin(s) artificiel(s), étanches, dans un lieu couvert et/ou de plein air, dans lequel se pratiquent des activités aquatiques et dont l’eau est filtrée, désinfectée et désinfectante, renouvelée et recyclée, ainsi que tous les équipements strictement nécessaires à son fonctionnement ».


Le site de Bernard SUZANNE, ancien conseiller municipal de VENDARGUES (Hérault)
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Dernière mise à jour le 21 octobre 2009