L'affaire du plan de table au conseil municipal (suite et FIN)
31 octobre - 10 novembre 2006

(Page mise à jour le 10 novembre 2006, suite à la réception du courrier du maire informant les conseillers municipaux du groupe minoritaire qu'il a décidé de ne pas faire appel du jugement du 19 septembre 2006 annulant le plan de table qui séparait les élus minoritaires)

Un « détournement de pouvoir »

Par un jugement rendu le 19 septembre 2006, dont une copie intégrale est disponible sur ce site en cliquant ici, la 5ème chambre du Tribunal administratif de MONTPELLIER a donné raison aux élus du groupe minoritaire (Max HERMET, Jean-Claude TORRENT, Virginie BEYAERT, épouse SUC, et Bernard SUZANNE) et annulé la délibération du conseil municipal de VENDARGUES en date du 24 octobre 2002 par laquelle celui-ci modifiait son règlement intérieur pour y inclure un plan de table dont la seule finalité était de séparer les élus du groupe minoritaire en intercalant entre eux des élus du groupe majoritaire, « considérant... que les dispositions précitées de l'article L. 2121-8 du code général des collectivités territoriales [qui énonce que « Dans les communes de 3500 habitants et plus, le conseil municipal établit son règlement intérieur dans les six mois qui suivent son installation. Le règlement intérieur peut être déféré au tribunal administratif. »] n'habilitent pas le conseil municipal à porter une atteinte au droit d'expression de ses membres et à leur droit de se concerter entre eux, y compris en cours de séance ; que dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que la délibération attaquée est entachée de détournement de pouvoir et à demander son annulation ».

On trouvera un rappel de toute cette histoire déjà ancienne dans la page que nous avions consacrée alors à cette délibération et à celle qui l'avait précédée, en date du 12 septembre 2002, que le maire avait dû annuler (voir question n° 13 du conseil municipal du 24 octobre 2002) et faire revoter au conseil municipal suivant parce qu'elle ne respectait pas les formes requises.

Le tribunal confirme donc que le fait de disposer de la majorité au conseil municipal ne donne pas au maire le droit de faire ce qu'il veut et de détourner à son avantage le pouvoir dont il dispose pour brider ses opposants. Les juges sont donc ici en accord avec les propos du député Bernard ROMAN que nous avions cités dans notre requête au tribunal et dans la page de ce site qui exposait cette affaire, selon lesquels l'existence de « conseils municipaux où il n’y a qu’un seul micro, celui du maire, où les opposants sont disposés dans la salle de telle sorte qu’ils ne peuvent pas se concerter pendant la discussion et où les documents municipaux sont distribués le plus tard possible » (ce qui est exactement la situation à Vendargues) consituait une manière de « galvauder » la démocratie.

Par courrier en date du 8 novembre 2006, le maire, Pierre DUDIEUZÈRE, a informé les élus du groupe minoritaire qu'il avait « décidé de ne pas relever appel du jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 19 septembre 2006 », et qu'il se proposait de soumettre au prochain conseil municipal, annoncé pour le jeudi 23 novembre 2006, un nouveau plan de table dans lequel les quatre élus du groupe minoritaire (Max HERMET, Jean-Claude TORRENT, Virginie SUC et Bernard SUZANNE) sont placés côte à côte. Le jugement du 19 septembre 2006 est donc définitif.

Il n'en reste pas moins que le maire, par ce que les juges ont qualifié de « détournement de pouvoir », aura réussi à « porter une atteinte au droit d'expression de ses membres [appartenant au groupe minoritaire] et à leur droit de se concerter entre eux, y compris en cours de séance » pendant la plus grande partie de la mandature et donc à affaiblir son « opposition » par des moyens de les juges de première instance ont considérés comme illégaux. En cela, il aura atteint (en partie au moins) son but, mais en même temps montré le peu de cas qu'il fait, dans ses actes et au-delà de ses belles paroles, de la démocratie !

Et, pour défendre (en vain) devant le tribunal cette décision si évidemment contraire à la démocratie, il n'a pas hésité à puiser dans les deniers communaux puisque, si les élus du groupe minoritaire ont dû payer de leur poche les frais de justice pour faire valoir leur droit, le maire, lui, a utilisé l'argent des contribuables vendarguois en faisant prendre en charge par le budget de la commune les frais de procédure et les honoraires de l'avocat (maître Jean-Jacques PONS) qu'il avait mandaté pour défendre ce que des juges (ou le préfet dans l'affaire SITA, voir nos commentaires sur la question n° 7 du conseil municipal du 5 octobre 2006) qualifient de « détournement de pouvoir ». Chiffrés par lui-même pour en demander le remboursement par les élus minoritaires au cas où il aurait triomphé devant les juges, ces frais se montent à 3.048,80 €. Il est donc heureux qu'il ait décidé de ne pas faire appel, car l'appel aurait induit de nouveaux frais, toujours supportés par les contribuables vendarguois !

Quelques préalables pour comprendre le jugement

Pour comprendre les termes du jugement reproduit sur ce site, il est nécessaire de connaître au moins les grandes lignes de l'argumentation développée par l'avocat de la commune, maître Jean-Jacques PONS, puisque c'est à cette argumentation que répondent principalement les juges.

Dans son mémoire en défense en date du 18 décembre 2002, maître PONS demandait au tribunal de :

« DÉCLARER la requête irrecevable au principal, en conséquence la rejeter,

SUBSIDIAIREMENT la rejeter comme dépourvue de tout moyen fondé,

DONNER ACTE au représentant en exercice de la commune, Pierre DUDIEUZÈRE nommément visé par les requérants, de ce qu'il se réserve le droit d'agir à leur encontre devant toute juridiction compétente,

PROCÉDER sur le fondement de l'article L 741-2 du Code de Justice Administrative à la suppression des passages injurieux et diffamatoires contenus dans la requête susvisée et sus rapportés,

CONDAMNER solidairement les requérants à payer à la commune de VENDARGUES 3.048,80 euros sur application des dispositions de l'article L 751-1 du Code de Justice Administrative et aux dépens. »

C'est à ces 5 points et aux arguments produits à leur appui par maître PONS que répondent les 5 parties du jugement (précédées chacune d'un titre en gras commençant par « Sur... ») et les « considérant... » qui les composent. Nous allons donc examiner plus en détails ces différents argument dans la suite de cette page.

Sur les fins de non recevoir opposées par la commune de Vendargues

La première demande de maître PONS est de déclarer la requête irrecevable, c'est-à-dire ne répondant pas aux exigences de la loi pour pouvoir être prise en compte par le tribunal et analysée sur le fond. Pour étayer cette requête, maître PONS avance deux arguments :

  1. que Max HERMET, désigné par les autres conseillers municipaux cosignant la requête (Jean-Claude TORRENT, Virginie BEYAERT, épouse SUC, et Bernard SUZANNE) comme leur unique représentant dans cette affaire, n'aurait pas un « intérêt à agir » dans cette affaire du fait que, domicilié à SAINT-AUNÈS et non pas à VENDARGUES, « la délibération querellée ne peut donc lui préjudicier de quelque manière, puisqu'en dépit de sa qualité d'élu municipal, il n'est pas un administré de la commune » (la loi exige en effet d'une personne qui attaque devant le tribunal administratif une décision qu'elle estime illégale qu'elle ait un « intérêt à agir », c'est-à-dire qu'elle soit personnellement susceptible d'être lésée par la décision attaquée) ;
  2. que « la requête collective présentement analysée ne contient aucun moyen de légalité externe ou interne clairement identifié », alors que, selon le code de procédure adminsitrative, elle aurait dû « contenir l'exposé précis des faits et moyens » et « articuler (l'exigence, quoiqu'implicite, est constante) sur une cause juridique identifiée (légalité externe et/ou légalité interne) », c'est-à-dire que, selon lui, la manière dont nous avions développé notre argumentation ne répondait pas aux exigences de la loi et ne faissait pas clairement ressortir sur quels arguments de droit nous appuyions notre requête en annulation (les « moyens » dans le vocabulaire juridique, c'est-à-dire le renvoi à des textes et/ou à des jurisprudences étayant notre demande).

Le premier argument ne manque pas de piquant quand on sait que le maire, Pierre DUDIEUZÈRE, bien qu'il essaye de s'en cacher en faisant croire qu'il habite encore la maison dont il est propriétaire impasse des Écoles laïques et qui n'est plus pour lui qu'une boîte à lettres, habite en fait depuis plusieurs années à Cadenet, sur la commune CASTRIES (dont il est d'ailleurs natif). En effet, si l'on admet l'argument de maître PONS, le maire lui-même n'est pas intéressé par les décisions qu'il prend dans la commune dont il est maire ! En réalité, le code électoral n'impose nullement qu'un conseiller municipal réside dans la commune dont il est conseiller municipal, mais précise simplement (article L. 228) que « sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l'année de l'élection », ajoutant seulement que « dans les communes de plus de 500 habitants, le nombre des conseillers qui ne résident pas dans la commune au moment de l'élection ne peut excéder le quart des membres du conseil ». Max HERMET était alors (et depuis qu'il est en âge de voter) et est toujours régulièrement inscrit sur les listes électorales de VENDARGUES et remplit donc les conditions requises pour y être conseiller municipal. Et dès lors, comme le souligne le tribunal, il « a lui aussi intérêt à agir à raison de cette seule qualité [de conseiller municipal], alors même qu'il ne serait pas domicilié dans la commune ». De fait, on ne voit pas comment un conseiller municipal régulièrement élu n'aurait pas un intérêt personnel à attaquer une décision qui restreint sa capacité à remplir la fonction pour laquelle il a été élu !

Selon le second argument, pour maître PONS, notre requête est « longue et fastidieuse », « maladroitement présentée et dépourvue de toute cause juridique clairement identifiée », « exempte de tout moyen, hormis un prétendu détournement de pouvoir soulevé in extremis [...], même si par ailleurs elle offre d'ennuyeux développements consacrés à des points de droit constitutionnel ou électoral (p. 2 à 7) ou à des débats parlementaires dont on discerne mal l'intérêt dans la présente affaire (p.6 à 7) ». Selon lui, sa « présentation inhabituelle correspond davantage au découpage thématique d'un ouvrage qu'à une requête contentieuse » et « il s'agit de littérature polémique, ponctuée d'inutiles rappels historiques (rappel des lois de décentralisation de 1982 - 1983 : page 3, évocation de la "loi électorale" : page 4), sans la moindre utilité sur le plan contentieux, un recours tendant nécessairement à certaines fins (suspension, annulation d'une décision...) et n'ayant pas pour objectif de communiquer des informations relatives à un domaine particulier du droit positif ». Bref, c'est parce que nous faisons trop de développements de droit qui ennuient maître PONS que notre requête manque de moyens de droit ! Et lorsque nous citons un député s'indignant dans un débat parlementaire de l'existence de « conseils municipaux où il n’y a qu’un seul micro, celui du maire, où les opposants sont disposés dans la salle de telle sorte qu’ils ne peuvent pas se concerter pendant la discussion et où les documents municipaux sont distribués le plus tard possible », il en « discerne mal l'intérêt dans la présente affaire » où il s'agit de contester une délibération visant justement à disposer les opposants dans la salle du conseil de telle sorte qu'ils ne puissent pas se concerter pendant la discussion ! Constatons seulement que, pour les juges, sans doute plus patients ou plus indulgents que maître PONS, « la requête comporte l'exposé de plusieurs moyens » et est donc recevable.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération attaquée

La seconde demande de maître PONS est la seule qui porte sur le fond de l'affaire. Son argumentation au soutien de sa demande de rejet pur et simple de la requête repose sur trois points.

Dans un premier temps, il laissait entendre que nous aurions reconnu nous-mêmes « la parfaite légalité de la décison attaquée », sous prétexte que, c'est vrai, nous avions admis d'entrée dans notre requête que ce n'était pas le principe de l'imposition d'un plan de table par voie du règlement intérieur que nous contestions, mais la spécificité du plan de table retenu, qui séparait les élus du groupe minoritaire, et les motivations de ce choix, qui, de l'aveu même du maire lors du débat sur la première version de la délibération, celle du 12 septembre 2002, enregistré et retranscrit par lui pour servir de procès-verbal de la séance (voir cette transcription reproduite dans une autre page de ce site) se limitaient à « la raison du fait majoritaire » et au souhait de la majorité municipale de voir les élus minoritaires séparés. Et nous avions aussi admis que la seconde délibération, celle du 24 octobre 2002, au contraire de la première, celle du 12 septembre 2002 que le maire avait dû faire annuler, avait respecté les formes requises pour consituer une modification du règlement intérieur, en ce qu'elle proposait bien l'inclusion d'un article supplémentaire à ce règlement, ce que ne faisait pas la première. Mais dire que la délibération était formellement valide en ce qu'elle respectait la structure et la présentation du règlement intérieur modifié ne voulait pas dire qu'on admettait que son contenu était acceptable, et de même, admettre que le règlement intérieur pouvait imposer un plan de table ne revenait pas à admettre qu'il pouvait validement impose n'importe quel plan de table.

Dans un second temps, maître PONS arguait qu'« aucun texte de droit positif ni aucune jurisprudence ne consacrent le droit, pour des élus d'une opposition municipale, de se constituer en groupes politiques ». C'est pour parer à cette objection, déjà évoquée lors des actions en référé que nous avions intentées contre les versions successive de la délibération, que nous avions consacré ce que maître PONS appelle « d'ennuyeux développements » à montrer que toute l'évolution de la législation et les modalités mêmes imposées par le code électoral en la forme d'un scrutin de listes sans ratures ni panachages dans les communes de plus de 3.500 habitants allaient dans le sens d'une reconnaissance de plus en plus grande de cette notion de « groupes politiques » dans les conseils municipaux, pour conclure par un argument qui ruinait l'argumentation de l'avocat de la commune, à savoir que c'est le règlement intérieur lui-même qui officialisait la notion de groupes politiques dans le conseil municipal de VENDARGUES à travers son chapitre 6, intitulé « l'organisation politique du conseil », et notamment son article 6.1 dont le premier alinéa précise que « les conseillers peuvent se constituer en groupes selon leurs affinités politique » (voir ce règlement intérieur disponible sur une autre page de ce site). Il était alors paradoxal que le même règlement intérieur offre aux conseillers municipaux la possibilité de se constituer en groupes et refuse à un tel groupe une fois constitué la possibilité de siéger devant le public pendant les conseils en tant que groupe, c'est-à-dire groupés !

De plus, ignorant ou faisant semblant d'ignorer les propos du maire en séance enregistrés par le maire lui-même, maître PONS voulait faire croire au tribunal que « la nouvelle répartition des places au Conseil Municipal s'[était] faite essentiellement en fonction d'un critère de rationalité et de fonctionnalité, évitant les rassemblements monolithiques d'élus qui [pouvaient] donner l'impression fâcheuse d'antagonismes systématiques et insurmontables entre les membres d'une municipalité dont la vocation est de travailler ensemble dans l'intérêt de la commune ». Bref, pour lui, une fois élus, tous les conseillers municipaux devraient être d'accord sur tout et il ne serait plus question d'avoir des points de vue divergents sur quoi que ce soit ! Si tel était le cas, on ne voit pas pourquoi le législateur aurait prévu d'attribuer des sièges aux listes minoritaires plutôt que de les attribuer tous à la liste arrivée en tête ! On reconnaît bien là la conception de Pierre DUDIEUZÈRE pour qui toute vélléité d'opposition ou de dissention ne peut être que le fait de la « politique politicienne » et n'avoir d'autre motifs que l'intention de lui nuire ou de le déniger !

Enfin, maître PONS considérait notre argumentation sur le « détournement de pouvoir » comme « spécieux » et arguait que « ce moyen se fonde exclusivement sur des propos que le maire aurait tenus et qui seraient l'aveu de desseins "répressifs" à l'encontre des élus minoritaires » (reconnaissant implicitement que notre requête proposait au moins un « moyen », et ruinant par là-même son argumentation sur le rejet faute de moyens !), complétant ces conditionnels par un autre conditionnel sur des propos qui « auraient été enregistrés sur bande magnétique » pour conclure que « force est de constater que les requérants sont bien embarrassés pour verser cette très improbable preuve au débat ». Et pour cause ! Notre requête avait été déposée le 20 novembre 2002. Or, c'est, comme nous l'avons déjà dit, le maire lui-même qui avait fait procéder à l'enregistrement de la séance du 12 septembre et à celle du 24 octobre 2002 et qui détenait ces bandes, et ce n'est que lors de la séance du 19 décembre 2002 qu'une première version provisoire de la transcription de la bande du 12 septembre a été remise aux conseillers municipaux, et lors de la séance du 18 février 2003 que les transcriptions des séances du 12 septembre et du 24 octobre 2002 ont été validées comme procès-verbaux desdites séances. Donc, lors du dépôt de notre requête le 20 novembre 2002, nous ne disposions pas encore de la première transcription de l'enregistrement de la séance du 12 septembre. Et ce n'est que dans un mémoire en réplique enregistré le 14 janvier 2003 pour répondre au mémoire de maître PONS en date du 12 décembre 2002, que nous avons pu produire la transcription distribuée le 19 décembre de l'enregistrement fait le 12 septembre, non encore validée comme PV de la séance, dans la mesure où, produite par le maire lui-même, elle ne pouvait tout au plus que pêcher en sa faveur !

Nous ne saurons sans doute jamais si maître PONS ignorait encore à la date de la rédaction de son mémoire (remis au tribunal le 12 décembre 2002) que le maire avait fait enregistrer la séance de conseil municipal du 12 septembre et quels propos il y avait tenus, mais le fait est qu'il n'a même pas cherché à défendre ces propos et s'est contenté, pour traiter de « moyen fantaisiste » le seul qu'il daignait reconnaître pour tel à l'appui de notre requête, de mettre en doute l'existence même de l'enregistrement fait par son propre client et la réalité des propos qui y étaient enregistrés et que nous rapportions alors de mémoire, alors même que, dans notre mémoire introductif auquel répondait maître PONS, on pouvait lire : « il suffira au tribunal de se reporter à l’enregistrement magnétique fait par les soins du maire de la séance du conseil municipal du 12 septembre 2002, où fut votée la première version de la délibération attaquée, pour entendre le maire lui-même avouer, en réponse aux questions de Max HERMET, que la seule justification du plan de table soumis au vote est de séparer les membres du groupe minoritaire » (gras dans l'original, soulignement ajouté pour cette page).

Face à cette argumentation, les juges n'ont même pas cherché à savoir si la notion de « groupes politiques » était ou non pertinente dans le conseil municipal d'une commune de la taille de VENDARGUES et se sont contentés :

Bref, selon les juges de la 5ème chambre du Tribunal administratif de MONTPELLIER, groupe ou pas groupe au sens politique, utiliser « le fait majoritaire » pour empêcher des élus minoritaires issus d'une même liste qui souhaitent siéger côte à côte pour pouvoir se concerter en séance de le faire est « une atteinte au droit d'expression » de ces élus qui constitue un « détournement de pouvoir » et mérite la censure du juge de l'excès de pouvoir.

Sur le caractère prétendument injurieux et diffamatoires de passages de la requête

Les deux demandes suivantes de maître PONS partent du fait que, pour lui et son client, « pauvre en moyens de droit, la requête regorge de passages injurieux et diffamatoires à l'encontre du maire de la commune de VENDARGUES, Pierre DUDIEUZERE ». Ce que visait ici l'avocat, ce sont les passages de notre requête dans lesquels nous avions tenté de replacer la délibération attaquée dans le contexte dans lequel elle avait été votée et de montrer par des références à d'autres actes de Pierre DUDIEUZÈRE que son comportement dans cette affaire n'était pas surprenant de sa part. Nous faisions entre autres référence à des faits ayant eu lieu durant son premier mandat (1989-95), à la contestation de la sincérité d'une délibération relative à la concertation sur la première version de la ZAC Pompidou au conseil municipal du 24 avril 2001 et du procès-verbal de cette séance, qui valurent aux élus minoritaires une condamnation en diffamation faute de pouvoir prouver aux juges leurs dires (voir notre page sur cette affaire), et encore à la manière dont le maire avait profité de la nécessité où il était du fait d'une loi nouvelle de modifier le règlement intérieur pour y préciser le droit du groupe minoritiare à disposer d'espace dans le bulletin municipal pour supprimer une autre mesure antérieurement prévue, la conférence des présidents de groupes qui l'obligeait à rencontrer Max HERMET au moins sept jours avant chaque conseil pour en évoquer l'ordre du jour (voir le procès-verbal du conseil municipal du 4 avril 2002, affaire n° 5).

Concernant ces passages, l'avocat de la commune demandait au tribunal :

Par ces demandes, le maire espérait avoir le beurre et l'argent du beurre : il voulait faire supprimer par les juges les passages qu'il jugeait diffamatories et injurieux, c'est-à-dire faire qu'ils soient considérés comme n'ayant jamais été écrits, mais néanmoins se réserver le droit d'attaquer leurs auteurs en diffamation comme s'ils existaient encore !

Mais les juges, non contents de ne pas donner suite à ces demandes contradictoires du maire, ont explicitement déclaré pour justifier leur refus que « les passages de la requête dont fait état la commune de Vendargues dans son mémoire en défense ne sauraient être regardés comme injurieux, outrageants ou diffamatoires ».

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Cet article dispose que le juge peut condamner « la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépends », c'est-à-dire à rembourser les honoraires d'avocats et autres frais induits par la procédure. Par sa dernière demande, le maire voulait donc que, si nous perdions, nous soyons condamnés à rembourser à la commune les frais de la procédure. Bien évidemment, puisque c'est à nous que le tribunal a donné raison en annulant la délibération contestée, il a du même coup constaté que la demande de la commune n'avait plus de sens, dès lors que c'était elle la partie perdante !

Pour notre part, bien que supportant les frais de procédure sur nos propres deniers, nous n'avions pas demandé l'application de cet article au cas où le tribunal nous donnerait raison.

On peut seulement regretter au final qu'il ne soit pas possible de faire condamner Pierre DUDIEUZÈRE à rembourser à la commune les frais (évalués par lui-même à 3.048,80 € lorsqu'il en demandait le remboursement par les requérants) qu'il lui a fait encourir pour tenter de défendre une délibération dont il était l'auteur et que les juges ont considéré comme un détournement de pouvoir. Car s'il est vrai que c'est en tant que maire qu'il a fait voter la délibération annulée et que celle-ci est une délibération de la commune, c'est bien la personne Pierre DUDIEUZÈRE qui a soumis au vote du conseil une délibération qui, au dire des juges, loin de servir l'intérêt des vendarguois, détournait à son profit et à celui de son groupe politique majoritaire le pouvoir dont il était investi en portant atteinte au droit d'expression des élus minoritaires. Mais non seulement le maire dispose de la majorité au conseil municipal pour imposer des décisions qui sont ensuite censurées par les juges, mais il dispose en plus des deniers communaux pour tenter de les défendre devant les tribunaux lorsque leur légalité est contestée !


Le site de Bernard SUZANNE, ancien conseiller municipal de VENDARGUES (Hérault)
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Dernière mise à jour le 6 novembre 2010